Chroniques du ver sot : La mégapole

Chroniques du ver sot

La méga Paule

 

Je pose mes valises, des « de Suza » en carton lusitanien, sur le quai quasi désert où un mendiant rigolard distribue des billets de 500€  à tous les flics qui l’approchent:  » A vot’ bon cœur, bande d’andouilles » crie-t-il en silence.

Les vapeurs absentes des TGV en grève me chatouillent le pif déjà bourré par un rhume de carabinier.

Qu’est-ce qui lui a pris à cette coquine de destinée de me rediriger dans cette ville où la méga Paule m’a jadis joué un sale tour?

Quand je qualifie Paule de méga, c’est un doux euphémisme: la Paule elle est si grosse que sa mère la remercie tous les jours de ne pas porter plainte contre elle…

Faut dire qu’elle s’y emploie, la Paule, à ne pas rester très mince: elle refuse de boire de l’alcool pour ne pas choper de délirium et elle fait bouffer ses cheveux 12 fois par jour.

Lorsque je l’ai rencontrée c’était un canon et je la sirotais à petites gorgées mais, allongée sur son lit vertical, elle me saoulait déjà avec ses histoires à dormir debout. Elle m’abreuvait de contes sur son comptable: un magicien des chiffres qui, en fin de compte, gagnait toujours à être connu.

Puis le poids des ans, allié au poids de sa balance, me lassa et je lui signifiais son congés sans préavis: « On s’perd pas d’vue, hein? » qu’elle me quémanda en essuyant ses yeux noircis par son rimmel en perdition. « Ouaiff » laconisais-je en guise de réponse et je m’en fus vers un autre baril sans autre forme de procès.

Erreur abracadabrantesque s’il en est: on ne quitte pas une femme déçue car on sait ce que les déçues sont…

Il faut bien avouer qu’elle avait de quoi être déçue cette brave Paule: comme je précédais ses désirs, elle suivait mes raisonnements. En gros, je lui faisais un mimi en lui expliquant qu’il me fallait 1000 € pour payer le gaz et cette brave femme me filait le blé pour éviter que je sois fauché: tu parles d’une moisson!

Mais ce qui l’avait filée en courroux c’est l’histoire suivante :

Un matin de printemps où les oiseaux te chantent au nez, une super nana toque à ma lourde:

–        « Kékecé? Gourmandais-je en détaillant la greluche de la tête aux pieds et des pieds à la tête en passant par ses nibards à faire damner un sein.

–        Je… à son tour elle me détaille comme un épicier

–        Vous?… lui lance-je en vissant mes yeux de baise dans son regard croquignolet

–        Vous me… je… puis d’une inspiration à faire péter les boutons de son corsage qui emprisonnait son corps sage elle me lâche d’un seul coup d’un seul:

–        Ça vous dirait d’empocher 2000 € rapidement?

–        Si ça me dirait? Demandez plutôt à un aveugle s’il a envie d’y voir! Qui dois-je tuer?

–        Juste mon ennui et favoriser mon envie de vous connaître un peu plus

Demandé comme ça, même un énuque raide n’aurait pu résister.

Ah ça, mes amis, pour se connaître un peu plus, nous nous sommes connus un peu plus!

J’empoche le flouze et je me mets au turf.

Après m’avoir fait remercier St Claude, elle me demande de jouer les lévriers arrogants et  de conduire la brouette congolaise puis me chante « mon légionnaire » avant de grimper aux rideaux en appelant sa mère.

Le combat cessa faute de con battant.

Enfin, nous reposions clope à clope quand la porte s’ouvre sur… La Paule.

–        Que vois-je? Mon mec et ma meilleure amie en train de fort niquer?

–        C’est elle qui m’a violé, hurle-je pris de court

–        Ne l’écoute pas, Popole, je venais juste te rendre les 2000 € que tu m’as prêtés avant hier et ce malotrou m’a demandé des intérêts! Se met à couiner ma récente ex;  ho la coquine! Elle m’avait piégé comme un débutant

–        Quoi? Mais je… C’est une affreuse méprise! Mais non… N’écoute pas cette salope, c’est une malfaisante qui veut ma perte! Sentant Paule dubitative je me dis que si le doute l’habite je peux espérer…

–        OK me dit-elle, aboule l’artiche

Et moi, que croyez vous que je fis ? Quel con! Au lieu d’assurer que je n’avais pas le fric pour faire mentir mon accusatrice sur toute la ligne et ainsi flinguer sa version malodorante des faits, je prends les 2000 € de la poche de mon futal et, tel le toutou qui remue la queue en quête de reconnaissance de son maître, je les tends à la Paule qui me les arrache des mains.

–        Tu avais les 2000 €! Ainsi c’est elle qui dit vrai? Tu me le payeras cher… très cher.

Ha, pour le payer cher, je l’ai payé cher. Et avec les intérêts encore!

Cette Pénélope des faubourgs, drapée dans sa dignité ébréchée ne trouva pas mieux que de me filer en pâture à un sien cousin, plus gitan que gentleman et plus cogneur que poète. Résultat: trois côtes polluées, deux côtes flottantes coulées, une arcade en orbite céleste, un foie ayant perdu la sienne (de foi), une rate en court bouillon et un estomac en forme de falaise.

J’avais bien essayé de titiller l’éventuelle âme chevaleresque de mon bourreau en lui affirmant qu’offensé j’avais le choix des armes, mais lorsque je pris « échecs »,  c’en fut un pour moi et les coups se mirent à pleuvoir sans que la météo l’annonce…

Vous commencez à mordre le topo?

Vous pigez pourquoi que revenir dans cette mégapole ne m’enchante pas plus que ça?

Tout à coup, j’entends un bruit caractéristique: un train arrive en gare. Sans réfléchir un millième de seconde, je tends mon bras prolongé de ma main elle-même surmontée d’un pouce tendu vers le ciel indiquant que j’autostope.

Ben, vous me croirez si vous voulez mais le train s’est arrêté pour me prendre.

Il m’arrive de penser que j’ai un don, ou en tous cas, que je suis digne d’un don; cette cloche de Didier Bourdon n’aurait pas dit mieux…

Bon, il est temps pour moi d’aller visiter une autre cité, d’accomplir mon destin qui m’emmène de villes en villes pour vous raconter mes histoires: les chroniques d’un ver sot.

Bises à tous et que nos femmes ne soit jamais veuves!

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10 thoughts on “Chroniques du ver sot : La mégapole

  1. à idiot, idiote et demie… il n'y a en effet aucun lien entre Janbier et Mega, hormis le montant de leurs émoluments, passés depuis en euros… c'est à tirer par les cheveux, je te l'accorde mais ça m'a fait rire, et de nos jours, un chou est un chou!

    à quand la suite?

  2. En effet, j'ai plus de cheveux à force d'y tirer dessus pour essayer de comprendre.

    La suite? Faudrait déjà que ça plaise un peu à nos lecteurs, et vu le nombre de visites et d'appréciations, je pense que je vais passer l'hiver au chaud.

  3. ha!!!! l'éternelle équation insoluble…écrire pour qui, pourquoi? Où et comment? ici, plus qu'ailleurs, c'est une gageure, mais petit à petit LAT fait son nid, pas très douillet, ok, mais suivi tout de même par des vers solitaires, peut-être trop timides pour déclarer leur présence aux nuisibles, mais…. ils sont là et bien là, à roder, nous frôler de leurs ailes invisibles.

    Bien sûr, c'est pas la guerre des maux ici, on ne vient pas déposer ses jérémiades insipides ou se gausser d'un inaliénable courage d'enfoncer les portes ouvertes de nos charitables ostentations barbares! alors forcément en s'inscrivant ici et en y jetant ses mignonnettes à la mare, on a tout d'une bande de canards boiteux, mais ce n'est pas sans charme un canard, ce n'est pas sans panache non plus! à nos moulins à vent!

    …ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid…

    😉

    1. Dans l'éternelle équation insoluble tu oublies juste un détail : l'essence qu'il faut au moteur de notre envie de création…

      J'ai essayé de m'écrire à moi même et pour moi même… si je te dis que j'en suis revenu? (poil au nez, bien sûr)

      1. bon, je compte pour du beurre, mais ça aussi j'en suis revenue…;-) ce que je sais c'est que depuis l'épisode rappelé plus haut (cf lgdm) tu n'as pas raccroché les gants! et moi non plus et qq autres encore…. écrire pour soi-même? et pourquoi pas d'ailleurs? mais si tel était le cas, semblables à mille autres, que dis-je mille autres, des millions d'autres! on tiendrait une sorte de journal intime, caché qq part…. Mais je comprends parfaitement ton point de vue, qui, si je ne le partage pas, au minimum l'entends-je… de toute façon, on est toujours déçu par les "retours", jamais à la hauteur, peut-être les émoticônes manquent-ils mais j'y suis allergique…. Puisqu'on est entre nous et que personne ne lit, je vais te faire une confidence. Au sujet du MAG2CH' auquel a participé une quinzaine d'auteurs. que croyez-vous qu'il arrivât à la suite de sa publication? ( je dis "vous" car dans la phrase, tout d'un coup ça sonne mieusse)) . les dernières stats affichent une centaine de lecteurs, et les rares commentaires sont rapatriés de facebook! chacun sur sa page, comme il se doit, chacun satisfait de son propre travail mais insensible à celui des autres. Et bien, selon moi, mais c'est peut-être ma méthode Coué, qui sait, c'est égal. Mon plaisir d'écrire sera TOUJOURS supérieur, mais largement supérieur, au retour.

        On trouve toutes sortes de lecteurs, ceux qui n'osent pas écrire, à la suite d'un texte qui leur a plu, une "banalité", ceux qui n'osent pas davantage exprimer une critique, et ceux, les pires!, qui écrivent eux-mêmes.Rares sont ceux parmi eux qui "partagent" ne serait-ce qu'une émotion, même furtive. la moindre de leur production est un trésor précieux qu'ils veulent garder pour eux, et c'est leur droit après tout! Enfin, bref, LAT existe, ce n'est pas un goulag, on y entre on y sort et chacun reste libre! au fait, n'as-tu jamais pensé à te créer un blog? Quoi? Qu'est-ce que j'ai dit encore???? 😉

    1. Ben… c'est la question que je nous pose. En tous les cas, je n'y suis pour rien. Ou c'est involontaire. Ou c'est la faute au gouvernement.

      Ou c'est encore un coup des pieds noirs.

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